Nanoparticules Un appel à plus de prudence
Nanoparticules
Un appel à plus de prudence
Il est temps d’agir pour protéger la santé des consommateurs et de l’environnement. C’est en substance l’appel qu’ont lancé les membres du Comité de la prévention et de la précaution lors de la remise de leur rapport sur les nanoparticules.
À cause de leur taille infinitésimale, augmentant a priori leurs potentialités toxiques, et de leur comportement imprévisible, les nanoparticules, présentes dans de nombreux produits de consommation courante, sont l’objet d’une vigilance particulière de la communauté scientifique. Mais les décisions politiques tardent à être prises, si ce n’est l’interdiction du dioxyde de titane dans les produits alimentaires. C’est ce qui est ressorti de la présentation à la presse du rapport du Comité de la prévention et de la précaution (CPP), groupe d’experts placé sous l’égide du ministère de la Transition écologique et solidaire.
Les besoins en matière de recherche sont considérables, ont souligné les membres du CPP. Le problème central est qu’on ne sait pas bien mesurer les nanoparticules, c’est une entrave majeure à l’évaluation des risques auxquels sont exposés travailleurs et consommateurs. Malgré tout, les recherches se multiplient et confirment que ces particules ont une capacité particulière à franchir les barrières biologiques normalement protectrices, y compris la barrière placentaire, ce qui leur confère une potentialité toxique accrue. Les capacités d’accumulation dans l’organisme des « nanos » doivent aussi être prises en compte en priorité pour éviter des scandales sanitaires tels que ceux de la silice (responsable de la silicose des mineurs) ou de l’amiante.
IMMOBILISME DES POUVOIRS PUBLICS
La question du devenir dans l’environnement de ces substances est également cruciale. On pense par exemple aux nanoparticules d’argent (vêtements avec traitement antibactérien, pansements) dont les propriétés bactéricides en font une menace pour les écosystèmes. On voit l’ampleur de la tâche à laquelle doivent s’atteler les chercheurs, malheureusement les rigidités propres à l’administration française leur mettent des bâtons dans les roues. Ainsi, le Haut conseil de santé publique est supposé évaluer les risques auxquels sont exposés les travailleurs et riverains d’usines produisant du dioxyde de titane nanométrique. Mais il n’a pas, réglementairement, accès au registre recensant ces sites de production et les quantités produites ! Depuis plus d’un an, le travail des scientifiques est bloqué de ce fait. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de l’immobilisme des pouvoirs publics, encouragés en cela par des industriels qui ont tout intérêt à jouer la montre.
Dans ce contexte, le CPP appelle à un sursaut et regrette la faible prise en compte de l’intérêt des consommateurs et citoyens. « En tant que pédiatre, je suis préoccupé par le caractère pro-inflammatoire de beaucoup de ces particules, l’inflammation étant en tête des facteurs menant au cancer, a déclaré Alain Grimfeld, président du CPP. Nous sommes dans le cas typique où doit s’appliquer le principe de précaution avec des substances présentant un danger non complètement défini mais plausible et ayant un impact possible important en matière de santé. On ne peut pas continuer à produire des nanoparticules par milliers de tonnes en disant « circulez, y a rien à voir ». »
AUTORISATION PRÉALABLE COMME POUR LES MÉDICAMENTS
Pour une meilleure prise en compte de l’utilité pour la société de ces substances préoccupantes, le CPP a même évoqué l’idée d’une autorisation préalable de mise sur le marché, sur le modèle des médicaments. Pour chaque produit, l’intérêt de l’introduction de nanoparticules serait mis en balance avec les risques potentiels. Si un tel système avait existé dans le passé, on aurait pu par exemple se demander si le fait d’avoir des bonbons un peu plus brillants (cas du nano-dioxyde de titane) ou des chaussettes un peu moins malodorantes (cas du nano-argent) pouvait justifier les risques pour la santé et l’environnement.
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Fabienne Maleysson